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Affect tag, le bracelet capable de mesurer les émotions

Ce bracelet, mis au point par la start-up française Neotrope, fonctionne un peu sur le principe du détecteur de mensonge. Il est pour le moment utilisé lors de tests marketing.

De l'extérieur, le bracelet « Affect Tag » ressemble à n'importe quel bracelet connecté. Plastique noir, design épuré, quelques capteurs.

Mais cette technologie mise au point par la start-up française Neotrope n'est pas du genre à calculer la rapidité de la foulée lors d'un footing, mais à mesurer les émotions de son utilisateur.

« Le bracelet donne plusieurs indicateurs : l'intensité des émotions, la fréquence de stimulation (à quels moments il y a eu des émotions) et la charge cognitive (le niveau d'attention de la personne), explique Olivier Janin, le PDG de Neotrope. Cela ne dit pas si l'émotion est positive ou négative, mais on est en train de travailler dessus ». Pour le moment, ce paramètre est déduit par le contexte.

Pour mesurer les émotions, la start-up se base sur les signes physiologiques. « Dès que vous ressentez une émotion, il y a une microsudation qui se déclenche, imperceptible mais mesurable, au niveau du poignet », explique le PDG. « On mesure aussi le rythme cardiaque et la température corporelle. C'est un peu le principe du détecteur de mensonge, mais portatif ».

L'interview vidéo d'Olivier Janin, de Neotrope

Moins encombrant que la reconnaissance faciale

Neotrope aurait pu se baser sur la reconnaissance faciale pour détecter les émotions humaines, comme Apple avec ses Animojis. « Mais ce système nécessite d'avoir une caméra en permanence face à soi et il ne mesure pas l'intensité de l'émotion », note Olivier Janin. De plus, selon les cultures, « une expression faciale ne veut pas toujours dire la même chose ».

Une autre méthode consiste à lire les émotions directement dans le cerveau grâce à des capteurs ou une IRM. Mais, une fois encore, cela nécessite un matériel encombrant, là où un simple bracelet s'oublie vite.

Un outil pour la recherche marketing

Neotrope, qui a passé trois ans en « recherche et développement » pour concevoir cette nouvelle technologie, a choisi d'investir le secteur de la recherche marketing.

« Dans ces industries, les méthodes classiques sont déclaratives. On montre à un groupe de personnes un nouveau packaging et on leur demande : 'Qu'est-ce que vous en pensez ?'. Nous, on permet aux marques de savoir en temps réel ce qui a créé la réponse émotionnelle et le niveau d'engagement », soutient-il.

Test de jeu vidéo, de spot de publicité, de nouveau parfum... Les possibilités de mesure des émotions sont multiples. « On a par exemple travaillé avec Intermarché sur leur rayon bio. Ils voulaient que ce rayon soit un espace de repos », cite l'entrepreneur. Les courbes enregistrées dans le bracelet ont confirmé que ce rayon « permettait à la personne de trouver facilement son produit sans être sur stimulée ».

Neotrope a même pu aller plus loin en dressant la « cartographie émotionnelle » de tout le magasin. En faisant leurs courses, les cobayes porteurs de bracelet leur ont permis de déterminer dans quelles zones ils ressentent des émotions fortes (par exemple là où le packaging habituel des produits a été changé) ou dans quels rayons ils se sentent perdus (« le rayon des conserves est un vrai labyrinthe cognitif, on confond les flageolets, les petits pois, les haricots fins ou extra-fins... »).

Collaborations avec Ubisoft, Renault, Disneyland...

Pénétrer dans la tête du client et savoir à la seconde près ses sentiments face à un produit ou une expérience, c'est un rêve qui se réalise pour les marques.

« On travaille avec Ubisoft depuis début 2015 pour tester des jeux vidéo. On a aidé Kipsta à savoir si leur nouveau système de laçage de chaussures convenait aux enfants. On a aussi fait une étude sur les fragrances avec Dior. Nos indicateurs révèlent la préférence que l'on a de manière inconsciente pour un parfum », liste Olivier Janin. Intermarché, Decathlon, BVA, Renault et même récemment Disneyland Paris ont également fait appel à la start-up.

« Notre modèle économique, c'est de l'abonnement : pour 1.000,00 euros par mois, on met à disposition six bracelets et un accès à la plateforme, à toutes les données, pour faire des analyses statistiques », explique le PDG de la start-up fondée en 2009.

L'informatique émotionnelle, un marché à 50 milliards d'euros

Si le mot à la mode est aujourd'hui « intelligence artificielle », dans deux ans, « on ne parlera plus que d'affective computing », assure le chef d'entreprise, aujourd'hui à la tête d'une équipe de six personnes.

D'après un rapport de Markets and Markets, le marché de l'informatique émotionnelle pèsera près de 54 milliards de dollars en 2021, grâce une croissance de plus de 30 % chaque année.

L'analyse des émotions du consommateur portera le marché à un niveau mondial, prédit TechSi Research. Les entreprises, Google en tête, vont chercher à analyser les comportements de leurs utilisateurs et même à prédire leurs besoins.

Robot-assistant réagissant à vos émotions

Mais les autres applications de cette technologie sont innombrables. Dans les hôpitaux et les maisons de retraite par exemple, les robots-assistants pourront bientôt prendre en compte l'état émotionnel des résidents.

« Dans cinq ans votre robot ménager au milieu de votre séjour, au-delà de la commande vocale que vous lui passerez, comme 'sers-moi un jus d'orange', va aussi réagir à votre état émotionnel comme un majordome », affirme Olivier Janin.

Sa start-up, qui s'est lancée sur fonds propre avec un soutien de la BPI et un soutien bancaire, compte accélérer sur le créneau du marketing en 2018, avec pour objectif une cinquantaine de clients abonnés.

A l'avenir, l'ingénieur rêve d'applications dans le domaine de la santé. « On pourrait être une aide dans les thérapies cognotivo-comportementales, explique-t-il. En aidant par exemple à décrypter les émotions des personnes autistes ».

Source : https://www.lesechos.fr